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8 février 2014 6 08 /02 /février /2014 12:46

Savez-vous ce que c'est qu'une nuit entière

A attendre un sourire de pierre, des yeux verts ?

Ô le fleuve se recroqueville et sourd, frappe vil,

Les philistins qui n'ont rien compris aux villes.

 

Ah, le monstre sur le plancher, le cafard penché

Sur mon oeil au sang renouvelé, le rasoir, le déchet.

Savez-vous ce que c'est que la colère muette

Qu'on etouffe dans ses veines pour viser les mouettes ?

 

Savez-vous ce que c'est que des journées d'ennui et d'été

Où l'on insulte sa mère, la mare et sa bien-aimée ?

L'affront répété au cours du jour, la pétale de thé

S'effrite au bruit du clairon, il accoure à jamais !

 

Le quatrain enerve l'insensé ce rythme tassé

ABBA, ABAB, AABB, et ainsi de suite, A dvitam B ternam !

Savez-vous ce que c'est qu'une goutte effacée

Que vous sentez toujours sur le point de tomber...

 

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8 février 2014 6 08 /02 /février /2014 11:14

  « Peut être qu'au fin fond de ce que je suis... » il fit une pause en se detournant du miroir bleu, « ... Je ne sais rien. » se dit Henri. Il se passa alors la main sur le front. Il s'averra qu'il n'en avait pas, et sa main traversa le vide de la pièce. Il ne versa pas une larme, ils les avaient épuisées, il avait jeté les armes dans des ronces de son garage, mais il fut tout de même deconcerté : Il avait un sacré mal de crâne et pourtant, il avait perdu la tête.

  Cette incisive sensation d'avoir perdu quelquechose sans l'avoir remarquée, comme lorsqu'un ami vous quitte alors que vous étiez si concentré sur la fleuraison des Narcisses, oui, ce sentiment ne s'exprimait que dans son esprit car ses yeux, sa bouche n'étaient plus pour temoigner de l'âme.

  Henri en avait assez de ces âneries, il s'affessa sur son canapé, mais ne put agripper le livre d'espionnage sur le comptoir cramoisi, mal fini, inégal. En effet, ses bras avaient disparu. Facheux, comme c'est facheux, hurla à de milliers de corridors de distance, la Pensée d'Henri. Celle-ci courrait, fuyait les schleus, ceci lui était égal, mais elle les fuyait, c'était ainsi. La Pensée avait mal aux pieds, c'était un sale Dimanche venteux, elle aurait voulu mourir, prendre de longues vacances ou se fiancer pour de bon. C'était en vain, les boches faisaient des choses moches sur le corps de Henri, qui se decomposait sur le canapé. Il devenait à vu d'oeil, un brouillon de roman, les feuilles volantes se desoldarisaient des autres, des écritures peu soignées tombaient comme des flaques maladives, des fleuves pollués sur le sol du salon. L'acide coulait entre le tapis et le chient sommeillant, veillant dans un rebord humide de la pièce.

  La Pensée aperçut une lumière négative ; elle emanait du squelette tout dehors de Henri, blanc et affable. C'était une armoire vide, une blouse sans jolie femme, une caisse à jouets qu'aucun enfant n'avait fouillé. Son crâne défait, ses cheveux en morceaux de tabac, tombaient dans le chaos de l'execution, son ossature écartelée, le dos comme une arche des ruines romaines, tout cela était une photographie en négatif.

  Et dans le coin droit de la photographie, vous savez, là où l'on met son pouce pour tenir la photographie, il y avait des Narcisses désséchées.

  Le surlendemain, on retrouva son visage dans une Bibliothèque de Londres. 

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6 février 2014 4 06 /02 /février /2014 16:20

Gênes, j'aime une femme lointaine ;

Paris, je ris avec la jolie Elise.

Nous passons de prose en vers, de verre en pose

Et à la lumière des vesprées citadines

Je regarde sa frimousse, ah voilà Trieste !...

 

Le train nous fait descendre, je veux attendre

Ne nous embrassons qu'arrivés à Vienne.

Prusse orientale, je traverse ta beauté ;

Moscou, tu me tords le cou, tu as tort,

Anna, de punir le fauve blanc, le fort

Est faible dans l'arène de Nîmes.

 

 Une ligne de trop, le rail défile

Par le carreau, j'aperçois Londres, Jane

Nous y serons prisonniers de soie

Le matin à Berlin, le lin nous retient ensemble

Je sors difficilement du lit, du foyer germain.

 

Madrid, tu n'as pas pris une ride, Matilda,

Attablée à la terrasse du monde, tu plonges

Tes lèvres dans le rhum, dans l'amour,

Dans mon coeur, dans mon corps, dans mon for

Intérieur, petit appartement au Tonkin

Où nous fermons la lumière, taquins.

 

Après tant de voyages, j'en viens à penser que les villes sont des femmes vénales.

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6 février 2014 4 06 /02 /février /2014 16:13

À présent que la senteur de christophines,

Que la Vérité Absolue déplût

L'errance peut bien recommencer, la rosée

Peut bien emporter l'enfance en exil !

 

À présent que les fusils d'ébène

Que la chanson guerrière ressent

Le temps farouche et dual, l'aubaine

Pour le chasseur solitaire, il pleure, frêle...

 

À présent que les orages du Sud

Que la colère de cendre et de ruine cesse

Moctezuma, où vas-tu en peine

Avec tes enfants, où mènes-tu l'affront ?

 

À présent que l'Amerique nue

Que les espagnols dansent, hystériques,

La terre s'abandonne à la nostalgie

Un regard vers les champs et les temples.

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2 février 2014 7 02 /02 /février /2014 09:59

 Ses yeux graves me regardèrent du fin fond de la salle. Je me remis alors au travail, me penchant sur mes plans. Des figures osseuses, crayonnées, instables comme des oiseaux mal gravés sur un mur, prêt à quitter le statique pour s'envoler au-dehors. Mais les deux pupilles noires aux accents roux fixaient ces choses pour qu'elles n'osent bouger. Et soudain, je répondais à ces deux yeux terrifiants et beaux, je me rendis compte que toute ma vie jusqu'ici avait été celle de ces dessins asservis. Ces deux yeux m'avaient posé sur cette chaise, ils m'avaient appris à les aimer, ils m'avaient pousser à faire des enfants, ils avaient fait de moi un père, un architecte, un héros, un lâche.

 La salle obscure de la chambre de travail s’étendit. Une lumière perça la distance qui me séparait des deux yeux. Une brise lourde abattait mon corps, des parapluies virevoltaient au loin – d'autres oiseaux migrateurs ? Je revoyais parfaitement le jardin anglais, aux acacias rouges, aux chauves souris sommeillant, et moi grommelant face au vent. Ses yeux graves me regardèrent pour la première fois, par dessus eux, une ombrelle à la couleur de cendre, elle tendit un bras extrêmement blanc. J'eus une idée de diable, le mordre, il était si éclatant dans le jardin grisâtre comme les chats qui passaient à coté de certains bassins. Entre ses yeux et mes lèvres, un silence gronda.

  J'ai fait l'erreur de l'aimer. J'ai alors tourné les cadrans des fleurs, et les yeux me capturèrent. Hélas ! Ils étaient trop puissants pour lutter, c'était la fascination du chien rencontrant un loup par le lac. Ses yeux prirent une douceur de feu en m'accompagnant au travers des acacias devenant de plus en plus rouges, comme des cristaux s’intensifiant de l’intérieur.

  Le vent perçait mon corps, je n'étais plus qu'un de ces grands palais arabes sans portes dont on m'a tant parlé durant mon enfance. Les chats gris ronronnaient en cadence comme pour célébrer l’étreinte. Je pleurais presque, comme une général qui voit depuis une colline sans nom, ses troupes partirent à la débandade. Ainsi, je me détournais du spectacle de mon propre échec pour observer ses yeux graves qui faisaient de même.

A ce moment, elle sourit.

 

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26 janvier 2014 7 26 /01 /janvier /2014 12:15

Je suis la noirceur qui toujours ment avec le coeur

Le gant jouant au damier dement ne m'ecoeure

Laissons ce pigeon ramier, qu'il me remplace

Sur cette place vide d'étoiles lasses.

 

Je suis le broyeur de craie et de gomme

L'esprit m'endiable, j'affabule la mort des hommes

Que je croise comme l'on attache une fibule,

Entre deux ports, la mer n'a ni fin ni sang.

 

Je suis l'anti-tout, l'anti-clause

l'épée se lève au ciel gris morose.

Aucun soleil n'allume de feu vengeur le jeu.

 

Je ne suis qu'une fin de poème

et beaucoup de choses ; pour chaque conclusion

une allusion toute rose, enfin beige à crampons jaunes.

 

Je suis celui qui dit mourir en 1906

celui qui promet la rime et la vole

celui qu parle à la troisième personne

d'ailleurs qui est-elle sinon Isis ?

 

Je suis la voix soufflant bas les mots

par peur de l'écho et des émaux

glissant sur le fin bruit des criards.

L'oeil baveux à crédit.

 

Je suis au courant, électrique.

La bibliothèque est vide de livres, pleine de pages

Frenetique pomme, je te mords d'amour

Jusqu'à la mort des êtres et des papillons sages.

 

Je suis le mouvement perpetuel, l'ossature du rêve

la mouvance des corps sur le sol, la salamandre

sur le sable, le vent qui crêve.

 

Je suis le rapprochement des rails, l'ultime gare,

le manque de chauffeur, la faim du malade,

l'oeil se refermant comme la fleur menteuse.

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19 janvier 2014 7 19 /01 /janvier /2014 15:01

J'entends de temps en temps d'épatants étangs dans mon oreille.

Je me souviens trop pour être présent.

 

Le f est une femme souple et belle,

Elle se balance, tranquille

Le l est un gentilhomme agile,

Il se balade en guelfe.

 

Comme cette crevasse de lumière

Comme cette porte entr'ouverte

Comme ce visage avenant

Les mathematiques sont le soleil du monde.

 

Le rouleau compresseur russe

Le roux Laocon presse, heureuse !

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19 janvier 2014 7 19 /01 /janvier /2014 14:50
 « Chacun sait que dans les rêves on ne voit
jamais le soleil, bien qu'on ait souvent
la perception d'une clarté beaucoup plus vive.
Les objets et les corps sont lumineux par
eux-mêmes. » 
Aurélia, Gerard de Nerval

 

Un rêve s'ouvre sur un rêve  

Comme le fleuve oeuvre pour le ruisseau.

Et des fenêtres se brisent sur d'autres

Ce château que j'habite trop tôt

S'ouvre sur un vaste domaine effrayant

Je n'ose sortir de l'osmose des fontaines

Entourées de vieilles pierres pierres rien ne tremble

Sauf ma main dans le noir de demain

 

Je cherche la sortie du cher manoir

Mais la porte ne donne que sur un autre

Le rêve le satané rêve mon corps

tombeau de mon âme mon âme

cage de mon corps et ainsi la toupie

infinie de pi puis le plafond se fend

 

Je ne suis plus

qu'une goutte

sur  un miroir

une voute

dérisoire

retient un petit monde

 

Un rêve élève de nouvelles paupières

Les yeux observent d'autres yeux

Toi, celui qui ne dort que pour le repos

Ne fatigues-tu pas d'ors et déjà des jours

Defilant comme des rails, des filles sans attaches ?

 

Ce petit monde fou, ce château etouffe

Il éclate insensiblement, il boucle le sens

Je cherche ce que tu n'as jamais chuté

La cage et la clé ne font qu'une :

Le rêve s'ouvre sur le rêve.

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18 janvier 2014 6 18 /01 /janvier /2014 22:36

Dans une ville de Provence, un artiste peignait

Sa main décrivait les grandes montagnes vertes

Et jaunes et rouges, il s'acharnait sans perte

Sur de larges peintures, si bien qu'il en geignait.

 

Le travail était tant magistral, qu'en bon génie

Il possédait deux immenses toiles de Gênes

Une pour y coller la couleur sans gêne,

L'autre pour y peindre les couchants jaunis.

 

Il cherchait en étalant ses talents, au pinceau qui dévale,

Penché sur son chevalet, haut comme un cheval

Et imposant, à réaliser en un instant, l’Oeuvre

Celle-ci serait alors si belle, qu'il la fiancerait d'épreuve.

 

L'effort fut gigantesque, le fort du peintre,

Les formes gargantuesques sur la toile,

Les teintes fauves et grenouillantes à voile

Pourtant, ne produisirent rien qui valut un cintre.

 

Le malheureux ne vit jamais, quel maladroit

La production de ces mains soumis au mal de doigt

Ce sublime laissé sur la toile de fond, l'expression

D'un chef d’œuvre sur la palette, jolie impression.

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13 janvier 2014 1 13 /01 /janvier /2014 08:04

« Mon amour qu'à la fin du monde

Ah qu'au moins ma voix te réponde »

– Il y aura pas de Jugement Dernier, Louis Aragon

 

Sur le carrousel de la grande place

Flottait une poudre ocre des premiers âges,

Le cheval roux était mort, essouflé,

Et le vieil homme grognait pestilence.

 

Les enfants explosaient dans le lointain

Tous les lampadaires se dévissait

De la terre, leur racine se soulevait

Et le vieil homme prevenait de l'effondrement.

 

Je n'en croyais pas mes cheveux

Ni tes yeux bleus comme l'orage

Aquatique qui renversa la ville nénuphare

Et le vieil homme condamnait le présent.

 

La Lune chuta des cieux et du noir

Je la raccrochais à tes oreilles câlines

Car tu méritais les plus belles boucles

Et le vieille homme annonçait le nouveau.

 

Au bout du bus, direction Zülpich,

Il y avait une large brêche – de tempête !

On a préféré rester assis sur le chassis du carrousel,

Et le vieil homme grognait pestilence.

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Qui Est Le Dangereux Malade Derrière Tout Ça ?

  • : Renard, Castor et Pollux
  • : Orphée est mort ; J'ai fermé sa porte.
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